Elle n'a pas seulement en commun avec Susana Baca un prénom et une patrie d'Amérique latine. Susana Blaszko partage également avec la grande chanteuse péruvienne la même révolte contre l'injustice. Et si le propos de l'interprète argentine (d'adoption) se tourne vers un tango tantôt canaille tantôt plein d'amertume, elle n'oublie jamais ses origines, du côté de l'Afrique. "Oro y Plata" en témoigne largement. C'est une chanson sur l'esclavage qui parle du courage nécessaire à la survie quand on a la peau noire. Au long de ces plages qui réservent de bonnes surprises dans le domaine des percussions et des guitares insolites, Susana Blaszko adopte le ton juste pour la lamentation inconsolable qu'est le tango, avec la tristesse contenue dans la milonga, au coeur de cette musique. Le bandonéon vient ici couler des notes de nostalgie mais aussi de frivolité ("El Choco"). Avec sa façon de prononcer les syllabes indispensables (le "ll" devenant "ch", et le "s" se transformant "h" pour servir le propos), cette artiste montre un regard plein de respect pour la tradition mais sa proposition est aussi du côté du renouveau. En ce sens, cet album est à des lieues des clichés du genre. --José Ruiz